Dialogue de la nature et d'un Islandais.

Dialogue de la nature et d'un Islandais.


Un apologue de Giacomo Leopardi extrait de ses Petites Œuvres morales, suivi de ma traduction. 





    Un Islandais, qui avait parcouru le monde et séjourné dans les pays les plus divers, s'enfonça un jour au cœur de l'Afrique, et, s'aventurant au-dessous de l'Equateur en un lieu où nul être humain n'avait jamais mis le pied, eut une vision semblable à celle de Vasco de Gama, lorsqu'en doublant le Cap de Bonne-Espérance, il vit le cap lui-même, gardien des mers australes, se dresser face à lui sous la forme d'un géant afin de le dissuader de se risquer dans les eaux nouvelles. Notre Islandais, donc, aperçut au loin un buste énorme, qu'il prit tout d'abord pour une statue de pierre, du genre de ces colosses qu'il avait vus, des années auparavant, dans l'île de Pâques. Mais en se rapprochant, il comprit que cette forme était celle d'une femme gigantesque, assise à terre, la tête bien droite et le dos appuyé contre une montagne. Ce n'était pas une sculpture; elle vivait. Elle avait un visage mi-terrible, mi-beau, une sombre chevelure et des yeux très noirs, dont elle fixait le voyageur. Après un long moment de silence, elle prit enfin la parole : 

    LA NATURE : Qui es-tu ? Que cherches-tu dans des parages où ton espèce est inconnue ? 

    L'ISLANDAIS : Je suis un pauvre Islandais, qui vais fuyant la Nature. Je l'ai fuie toute ma vie dans cent régions du globe, et je la fuis maintenant dans celle-ci. 

    LA NATURE : Tu es comme l'écureuil qui fuit le serpent à sonnettes et finit par se jeter lui-même dans sa gueule. Je suis celle que tu fuis. 

    L'ISLANDAIS : Tu es la Nature ? 

    LA NATURE : En personne. 

    L'ISLANDAIS : J'en suis profondément fâché. Il ne pouvait m'arriver pire mésaventure. 

    LA NATURE : Tu aurais dû penser que je hantais surtout ces contrées où, tu ne l'ignores pas, se manifeste avec le plus d'éclat ma puissance. Mais pourquoi me fuyais-tu ? 

    L'ISLANDAIS : Sache que dès ma première jeunesse, quelques expériences malheureuses suffirent à me convaincre de la vanité de la vie et de la sottise des hommes. Je les vis se battre sans répit pour des plaisirs qui n'en sont pas et des biens qui ne servent à rien; subir et s'infliger réciproquement une foule de tracas et de maux qui les font souffrir et leur nuisent bien réellement; et s'éloigner ainsi tous les jours un peu plus de ce bonheur qu'ils ne cessent cependant de poursuivre. Pour ces raisons, renonçant à tout autre désir, je décidai, sans faire jamais tort à personne, sans chercher à améliorer mon état, sans me mesurer avec autrui pour aucun bien de ce monde, de vivre une vie paisible et obscure. N'attendant rien du plaisir, qui m'apparaissait refusé à notre espèce, j'envisageai simplement de me tenir à l'écart des souffrances. Cela ne signifie pas que j'entendais échapper au labeur et à l'effort : tu connais la différence entre la fatigue et le malaise, entre une vie tranquille et une vie passée dans l'inaction. À peine m'étais-je conformé à cette résolution, que j'appris combien il est vain de croire, lorsqu'on vit parmi les hommes, qu'il suffit de n'en blesser aucun pour éviter qu'ils ne vous blessent, et qu'en cédant toujours le premier, en se contentant du minimum, on vous laisse un peu de place et l'on ne vous dispute pas le peu que vous avez. Cependant, je me suis libéré sans difficulté des hommes et de leurs offenses en quittant leur société et en me retirant dans la solitude, ce qui dans mon île natale est chose facile. Vivant dès lors pour ainsi dire sans l'ombre d'un plaisir, je ne pus toutefois me soustraire à la souffrance. La longueur de l'hiver, l'intensité du froid et l'extrême chaleur de l'été qui caractérisent le climat du pays, me tourmentaient sans cesse; et comme le feu près duquel je devais passer la plupart de mon temps me desséchait la peau et que la fumée m'irritait les yeux, je ne me sentais jamais à l'aise, ni chez moi, ni au dehors. Je ne pouvais pas non plus mener l'existence paisible à laquelle j'aspirais si fort : les tempêtes épouvantables qui frappaient les côtes, les rugissements menaçants du mont Hékla, les risques d'incendie, auxquels s'exposent en permanence nos maisons en bois, tout cela ne cessait de troubler ma sérénité. Les incommodités d'une vie toujours égale à elle-même, libre de tout désir, de tout espoir et de tout autre souci que sa tranquillité, se manifestent rapidement et paraissent bien plus pénibles qu'elles ne le sont lorsque notre esprit est aux prises avec les tracas de la vie sociale et occupé à déjouer les embûches tendues par les hommes. Ainsi, plus je m'isolais et me renfermais sur moi-même afin de causer au monde le moins de gêne ou de trouble possible, plus les conditions extérieures m'imposaient leurs rigueurs. Je résolus alors de changer de pays et de climat, pour voir si quelque part sur la Terre, il est possible de vivre en n'offensant personne sans être offensé et en renonçant au plaisir sans pour autant souffrir. Ce qui me fit prendre une telle décision fut l'idée que tu avais peut-être réservé au genre humain un climat bien précis sur le globe, comme tu le fis pour toutes les espèces animales et végétales, et qu'en dehors de cette zone, les hommes ne pouvaient survivre sans difficultés ni malheur. C'est à eux-mêmes et non à toi qu'aurait dû être imputée leur infortune, puisqu'ils avaient orgueilleusement outrepassé les frontières où tu leur avais prescrit de séjourner. J'ai couru presque le monde entier, et étudié presque tous les pays en m'en tenant toujours à ma résolution de ne jamais porter préjudice à autrui, ou le moins possible, et de ne chercher pour mon compte qu'à vivre en paix. Je me suis donc brûlé à la chaleur des tropiques, gelé sous le ciel glacé des pôles, rendu fiévreux dans les zones tempérées en raison de trop grandes variations du climat et j'ai subi partout la violence des éléments. Que de contrées ai-je vues où il ne se passe un jour sans qu'éclate un orage, terrible bataille que tu livres contre les malheureux habitants pourtant innocents de toute injure à ton égard. Sous d'autres latitudes, la sérénité du climat trouve son revers dans la fréquence des tremblements de terre, dans la fureur des éruptions volcaniques, dans l'instabilité perpétuelle du sous-sol. Dans certaines régions épargnées par les autres calamités du ciel, ou encore à certaines saisons de l'année, se déchaînent des tornades gigantesques. Tantôt j'ai vu mon toit s'écrouler sous le poids de la neige, tantôt j'ai senti la terre ravinée par les pluies diluviennes, se dérober sous mes pieds; parfois même il m'a fallu fuir à perdre haleine des torrents qui me poursuivaient comme si j'avais commis envers eux quelque offense. Des fauves que je n'avais nullement provoqués ont tenté de me dévorer; des serpents de me mordre; parfois, il s'en est fallu de peu que les insectes ne me fassent succomber à leurs piqûres. Je ne parlerai pas des innombrables périls qui nous guettent chaque jour, au point qu'un philosophe de l'Antiquité n'a trouvé d'autre remède à la crainte que de considérer froidement que toute chose est à craindre. La maladie ne m'a pas non plus oublié, malgré la tempérance, ou plutôt la continence à l'endroit des plaisirs, que j'ai observée jusqu'à ce jour. Je m'étonne encore que tu aies mis en nous une soif si constante et si insatiable de plaisir, que sa privation en rende la vie incomplète; et que, par ailleurs, tu aies fait en sorte que l'usage des plaisirs soit de presque toutes les choses humaines la plus débilitante, la plus nuisible à la santé, la plus désastreuse de par ses effets sur chacun de nous et la plus hostile à la durée même de la vie. Mais même en m'abstenant presque toujours du plaisir, je n'ai pu éviter d'attraper toutes sortes de maladies. Certaines ont bien failli me faire périr, d'autres m'ôter l'usage d'un membre et me condamner à un sort plus misérable qu'avant; et toutes, durant des jours ou des mois, ont infligé mille tortures à mon corps et à mon âme. Et, bien que dans la maladie, chacun de nous éprouve des souffrances nouvelles et une infortune plus grande que de coutume, (comme si notre vie n'était pas déjà assez misérable), tu n'as pas en retour accordé à l'homme des moments de santé débordante, sans commune mesure avec son état normal, grâce à laquelle il connaîtrait quelque volupté rare, qui trancherait sur le reste de sa vie. Dans les pays enneigés, j'ai manqué perdre la vue, comme il arrive aux Lapons dans leur patrie. L'air et le soleil, éléments indispensables à la vie et dont nul ne saurait se passer, sont pourtant loin de nous être toujours salutaires : l'humidité et la rigueur du premier, la chaleur et même la lumière du second, font que celui qui s'expose à eux ne peut qu'avoir à en souffrir. Enfin si je ne me rappelle pas avoir passé un seul jour de ma vie sans quelque peine, je ne peux dénombrer ceux qui se sont écoulés sans même l'ombre d'une jouissance : je vois bien qu'il nous est tout aussi nécessaire de souffrir que de ne pas jouir; que c'est même là notre destin, et qu'il est tout aussi impossible de vivre en paix que de vivre heureux et angoissé. Je dois donc en conclure que tu es l'ennemie déclarée du genre humain, des autres animaux et de tout ton ouvrage. Tu nous épies, tu nous menaces, tu nous agresses, tu nous frappes, tu nous déchires, et toujours tu nous blesses et nous persécutes, car de toute éternité tu es le bourreau de ta propre famille, de tes enfants et, pour ainsi dire, de tes entrailles et de ton sang. Aussi toute espérance m'a-t-elle abandonné : si les hommes, eux, cessent de harceler celui qui les fuit et fait tout pour se tenir à l'écart, toi, sans la moindre raison, tu ne laisses pas de nous traquer jusqu'à ce que tu nous détruises. Je vois déjà venir l'âge amer et lugubre de la vieillesse, mal réel et manifeste, ou plutôt immense amoncellement de misères. Et là-dedans rien de fortuit, mais au contraire un mal que tes lois prescrivent à tous les êtres vivants, que chacun de nous pressent depuis l'enfance, qu'amorce au sortir de nos vingt ans un destin déplorable et une irrémissible dégradation. Ainsi un tiers de la vie est-il réservé à la floraison, quelques instants à peine à la maturité et à la plénitude, et tout le reste à la déchéance et à son cortège de disgrâces. 

    LA NATURE : Croyais-tu le monde fait tout exprès pour toi ? Sache qu'à de rares exceptions, dans tout ce que j'ai conçu, ordonné et mis en œuvre, j'ai eu de tout autres fins que le bonheur ou le malheur des hommes. Quand je vous blesse, quelle que soit l'arme ou les circonstances, je ne m'en rends pas compte, du moins presque jamais. Et même si je vous procure quelque plaisir ou quelque bien, je l'ignore. Contrairement à ce que vous croyez, je n'ai rien créé et je n'agis jamais pour vous plaire ou pour vous servir. D'ailleurs, quand bien même il m'arriverait de supprimer votre espèce, je ne m'en apercevrais pas. 

    L'ISLANDAIS : Mettons qu'un inconnu m'invite, non sans insister, à venir le voir dans sa maison de campagne; et que, moi, pour lui plaire, j'accepte de m'y rendre. Là on me donne pour tout séjour une cellule délabrée, croulante, où je risque à tout moment d'être enseveli; un trou humide, puant, ouvert au vent et à la pluie. Mon hôte, loin de se soucier de me divertir et de me procurer quelque agrément, se borne à ne pas me laisser complètement mourir de faim, et m'abandonne aux insultes, aux railleries, aux menaces et aux coups de sa progéniture et de la domesticité. Comme je me plains du traitement qui m'est fait, je m'entends répondre : "Crois-tu que j'ai bâti cette demeure à ton intention ? Que j'entretiens mes enfants et mes gens pour te servir ? Que je n'ai d'autre souci en tête que ta subsistance et tes loisirs ?" Ce à quoi je réplique aussitôt : "Ecoute, mon ami, tu n'as pas construit cette maison pour moi, c'est sûr; mais rien ne t'obligeait à m'y convier. Puisque c'est toi qui as voulu que je vienne, ne t'appartient-il pas de faire ton possible pour que j'y demeure au moins en sécurité ?" Eh bien cela, c'est à toi, Nature, que je le dis. Je sais fort bien que tu n'as pas créé le monde pour le service des hommes; je serais plutôt tenté de croire que tu l'as arrangé à dessein pour les tourmenter. Enfin, je te le demande : est-ce que je t'ai prié de me faire entrer dans cet univers ? En revanche, si c'est volontairement, à mon insu, sans que je puisse le refuser ou m'y opposer, que tu m'as placé là, n'as-tu pas le devoir, sinon de m'assurer liesse et prospérité dans ton royaume, tout au moins d'empêcher que je n'y sois une victime et que ce séjour ne me nuise. Ce que je dis de moi, je le dis de toute l'humanité, de tous les animaux, de toutes les créatures. 

    La NATURE : Evidemment, tu ne t'es pas aperçu que la vie dans l'univers n'est qu'un perpétuel circuit de production et de destruction, et que ces moments restent unis entre eux de façon que l'un serve continuellement à l'autre et à la conservation du monde. Si un seul s'arrêtait, le monde se décomposerait aussitôt. C'est pour cette raison que l'existence d'une seule créature qui ne souffrît pas, lui causerait d'irréparables dommages. 

    L'ISLANDAIS : Tous les philosophes en disent autant. Mais puisque tout ce qui est détruit souffre, et que ce qui détruit ne jouit même pas et se voit bientôt détruit à son tour, dis-moi ce qu'aucun philosophe n'a jamais su me dire; qui jouit, qui profite de cet univers d'infortune, dont la vie ne se maintient qu'au prix de souffrances et de la mort de tout ce qui le compose ? 


    Tandis qu'ils débattaient de cette question et de quelques autres de même nature, on raconte que survinrent deux lions si décharnés et si épuisés par la faim qu'ils eurent à peine la force de dévorer l'Islandais. Ce repas leur permit de subsister ce jour-là. Mais d'autres nient la chose et prétendent qu'un terrible coup de vent jeta l'Islandais à terre alors qu'il parlait et bâtit sur lui un superbe mausolée de sable, sous lequel, parfaitement desséché et transformé en une belle momie, il fut découvert par des voyageurs qui l'expédièrent dans le musée de je ne sais quelle ville d'Europe.










Dialogo della natura e di un Islandese.


Apologo di Giacomo Leopardi, estratto dalle sue Piccole Opere Morali




    Un Islandese, che aveva viaggiato attraverso il mondo e erava stato nei paesi più diversi, immerso un giorno nel cuore dell'Africa, e, avventurandosi sotto l'equatore in un luogo dove nessun essere umano non aveva mai messo il piede, ebbe una visione simile a quella di Vasco da Gama, quando raddoppiando il Capo di Buona Speranza, vide il Capo in sé, guardiano dei mari del sud, si distinguono davanti a lui sotto forma di un gigante per dissuaderlo dall'avventurarsi nelle nuove acque. Il nostro islandese, quindi, vide in lontananza un enorme busto, che prese per la prima volta per una statua di pietra, come quei colossi che aveva visto anni prima sull'isola di Pasqua. Ma mentre si avvicinava, si rese conto che quella forma era quella di una donna gigantesca, seduta per terra, con la testa dritta e la schiena contro una montagna. Non era una scultura; lei visse. Aveva un viso mezzo orribile e mezzo bello, capelli scuri e occhi molto neri, di cui stava fissando il viaggiatore. Dopo un lungo momento di silenzio, finalmente parlò :

    NATURA : chi sei ? Cosa stai cercando in luoghi in cui la tua specie è sconosciuta ?

    L'ISLANDESE : Io sono un povero Islandese, che fugge dalla natura. L'ho scappata per tutta la vita in cento regioni del globo, e ora lo fuggo in questa.

    NATURA : Sei come lo scoiàttolo che fugge dal serpente a sonagli e finisce per gettarsi nella sua bocca. Io sono quella che stai fuggendo.

    L'ISLANDESE : sei la Natura ?

    NATURA : di persona.

    L'ISLANDESE : Sono profondamente dispiaciuto per questo. Non poteva me succedere peggiore contrattempo.

    NATURA : Avresti dovuto pensare che infestavo sopratutto questi paesi in cui, non lo ignori, si trova la manifestazione più radiosa del mio potere. Ma perché stavi scappando ?

    L'ISLANDESE : Sappiate che fin dalla mia giovinezza, alcune esperienze sfortunate sono stati sufficienti a convincermi della vanità della vita e della follia degli uomini. Li ho visti combattere senza tregua per i piaceri che non sono piaceri e beni inutili; soffrire e intromettersi gli uni con gli altri una moltitudine di problemi e mali che li fanno soffrire e realmente li danneggiano; e così andare via ogni giorno un po 'di più da quella felicità che continuano comunque a perseguire. Per queste ragioni, rinunciando a qualsiasi altro desiderio, ho deciso, senza fare mai male a nessuno, senza cercare di migliorare la mia condizione senza misurarmi con gli altri per ogni bene di questo mondo, di vivere una vita tranquilla e oscura. Non aspettandomi nulla del piacere, che mi sembrava essere stato rifiutato alla nostra specie, pensai semplicemente di tenermi lontano dalla sofferenza. Questo non vuol dire che ho cercato di fuggire la fatica e lo sforzo, tu conosci la differenza tra fatica e disagio, tra una vita tranquilla e una vita trascorsa in inazione. Appena mi sono stato conformato alla risoluzione, ho imparato che è inutile credere, quando si vive tra gli uomini, è sufficiente fare alcun danno per impedire loro di farti del male, e che, cedendo sempre il primo, essendo soddisfatto del minimo, lasci una piccola stanza e non contiamo il poco che hai. Tuttavia, mi sono liberato senza difficoltà dagli uomini e dalle loro offese lasciando la loro società e ritirandosi nella solitudine, che nella mia isola nativa è facile. Vivendo, per così dire, senza un'ombra di piacere, non potevo, tuttavia, sfuggire alla sofferenza. La lunghezza dell'inverno, l'intensità del freddo e il caldo estremo dell'estate che caratterizzano il clima del paese, mi tormentavano costantemente; e come il fuoco, vicino al quale dovevo passare la maggior parte del mio tempo, mi asciugava la pelle e il fumo mi irritava gli occhi, non mi sentivo mai a mio agio né all'aperto. Né potevo guidare l'esistenza pacifica che desideravo così ardentemente : le terribili tempeste che hanno colpito la costa, i ruggiti minacciosi del Monte Hékla, il rischio di incendio, a cui le nostre case di legno sono costantemente esposte. tutto questo ha disturbato la mia serenità. Gli inconvenienti di una vita sempre uguale a se stessa, libera da ogni desiderio, ogni speranza e ogni altra preoccupazione che la sua tranquillità, si manifestano rapidamente e sembrano molto più dolorosi di quanto lo siano quando la nostra mente sta lottando. con il fastidio della vita sociale e impegnato a superare le insidie ​​degli uomini. Così, più mi isolavo e mi chiudevo per causare il minimo inconveniente o disturbo al mondo, più le condizioni esterne mi impongono i loro rigori. Decisi allora di cambiare paese e clima, per vedere se da qualche parte sulla Terra, è possibile vivere non offendendo nessuno senza essere offeso e rinunciando al piacere senza soffrire. Ciò che mi ha fatto prendere una tale decisione è stata l'idea che avresti potuto riservare un clima specifico per la razza umana sul globo, come hai fatto per tutte le specie animali e vegetali, e che al di fuori di questa area gli uomini non potrebbero sopravvivere senza difficoltà o sfortuna. Era a loro stessi e non a te che la loro disgrazia avrebbe dovuto essere imputata, poiché erano andati orgogliosamente oltre le frontiere in cui li avevi prescritti di restare. Ho corso quasi in tutto il mondo e ho studiato quasi tutti i paesi, attenendosi sempre alla mia determinazione di non danneggiare mai gli altri, o il meno possibile, e di cercare solo me stesso per vivere in pace. Così mi sono bruciato nel calore degli tropici, congelato sotto il cielo ghiacciato dei poli, febbrile nelle zone temperate a causa di variazioni troppo grandi del clima, e ovunque ho sofferto la violenza degli elementi. Quanti paesi ho visto, dove una tempesta non si verifica un giorno, una terribile battaglia stai combattendo contro gli sfortunati abitanti, eppure innocente di qualsiasi insulto per te ? In altre latitudini, la serenità del clima trova il suo rovescio nella frequenza dei terremoti, nella furia delle eruzioni vulcaniche, nella perpetua instabilità del sottosuolo. In certe regioni risparmiate dalle altre calamità del cielo, o in certe stagioni dell'anno, si scatenano giganteschi tornado. A volte ho visto il mio tetto crollare sotto il peso della neve, a volte ho sentito la terra devastata dalle forti piogge, nascondermi sotto i miei piedi; a volte anche io ho dovuto fuggire senza fiato da torrenti che mi perseguitavano come se avessi commesso qualche offesa contro di loro. Animali selvaggi che non avevo provocato cercarono di divorarmi; serpenti di mordermi; a volte, non passò molto tempo prima che gli insetti mi facessero soccombere ai loro morsi. Non parlerò degli innumerevoli pericoli che ci attendono ogni giorno, al punto che un antico filosofo non ha trovato altro rimedio per la paura che considerare freddamente che tutto deve essere temuto. Anche la malattia non mi ha dimenticato, nonostante la temperanza, o piuttosto la continenza di fronte ai piaceri, che ho osservato fino ad oggi. Sono ancora stupito che tu abbia messo in noi una sete così costante e così insaziabile di piacere, che la sua privazione renda la vita incompleta; e che, d'altra parte, hai fatto che l'uso dei piaceri è il più debilitante, il più dannoso per la salute, il più disastroso per i suoi effetti su ciascuno di noi e il più ostile alla stessa durata della vita. Ma anche con l'astensione quasi sempre dal piacere, non potevo evitare di prendere tutti i tipi di malattie. Alcuni mi hanno quasi distrutto, altri mi hanno privato dell'uso di un membro e mi hanno condannato a un destino più miserabile di prima; e tutto, per giorni o mesi, ha inflitto mille torture al mio corpo e alla mia anima. E, sebbene in malattia, ognuno di noi sperimenta nuove sofferenze e disgrazie più grandi del solito, (come se la nostra vita non fosse già abbastanza infelice), non hai in cambio concesso all'uomo momenti di salute traboccante, sproporzionata rispetto al suo stato normale, grazie al quale avrebbe conosciuto qualche raro piacere, che avrebbe cambiato dal resto della sua vita. Nei paesi innevati, ho perso la vista, come capita ai Lapponi nella loro patria. L'aria e il sole, elementi indispensabili alla vita, di cui nessuno può fare a meno, sono lontani dall'essere sempre salubri : l'umidità e il rigore del primo, il calore e anche la luce del secondo, fanno che quello chi si espone a loro può solo soffrire. Infine, se non ricordo spendere un solo giorno della mia vita senza un po 'di dolore, non posso contare coloro che hanno superato senza nemmeno uno straccio di godimento : vedo che siamo altrettanto necessaria soffrire di non godere; che questo è il nostro destino e che è altrettanto impossibile vivere in pace quanto vivere felici e angosciati. Devo quindi concludere che sei la nemica dichiarata della razza umana, altri animali e tutto il tuo lavoro. Ci spii, ci minacci, ci attacchi, ci colpisci, ci fai a pezzi, e sempre ci ferisci e ci perseguiti, perché da tutt'eternità sei il carnefice della tua stessa famiglia, dei tuoi figli e, quindi, per così dire, delle tue viscere e del tuo sangue. Così ogni speranza mi ha abbandonato : se gli uomini stessi, si fermano molesto colui che fugge e tutti di farsi da parte, è, senza alcun motivo, non si lascia di tenere traccia finché non ci distruggerai. Posso già vedere l'amara, cupa età della vecchiaia arrivare, reale e manifesta, o piuttosto un'immensa accumulazione di miserie. E lì non è un caso, ma piuttosto un male che le leggi prescrivono a tutti gli esseri viventi, siamo ogni pressione fin dall'infanzia, un primer per uscire dal nostro vent'anni un destino deplorevole e degradazione imperdonabile. Così un terzo della vita è riservato alla fioritura, solo pochi momenti alla maturità e alla pienezza, e tutto il resto alla decadenza e il suo treno di disonore.

    NATURA : Credi che il mondo sia fatto tutto apposta per te ? Sappi che con rare eccezioni, in tutto ciò che ho concepito, ordinato e attuato, ho avuto per scopi diversi dalla felicità o dalla disgrazia degli uomini. Quando ti ferisco, qualunque sia l'arma o le circostanze, non me ne rendo conto, almeno quasi mai. E anche se ti do un po 'di piacere o qualcosa di buono, non lo so. Contrariamente a ciò in cui credi, non ho creato nulla e non agisco mai per farti piacere o servirti. Inoltre, anche se mi capita di cancellare la tua specie, non me ne accorgo. 

    L'ISLANDESE : Diciamo che uno straniero mi invita, non senza insistere, a venire a vederlo nella sua casa di campagna; e che, per compiacerlo, sono d'accordo ad andare lì. Lì mi danno per ogni soggiorno una cella fatiscente, in rovina, dove rischio di essere sepolto da un momento all'altro; un buco bagnato e puzzolente, aperto al vento e alla pioggia. Il mio ospite, lungi dall'occuparsi di intrattenermi e procurarmi qualche piacere, si limita a non permettermi di morire completamente di fame e mi abbandona agli insulti, ai beffardi, alle minacce e ai colpi della sua prole e domesticità. Mentre mi lamento del trattamento che mi viene fatto, sento che dico : "Credi che ho costruito questa casa per te, che tengo i miei figli e il mio popolo al tuo servizio ? Che non ho in mente altre preoccupazioni del tuo sostentamento e dei tuoi divertimenti ?" Al che ho immediatamente risposto: "Guarda, amico mio, non hai costruito questa casa per me, questo è certo, ma non eri costretto ad invitarmi. Dato che sei stato tu a volere che venissi, non spetta a te fare del tuo meglio per tenermi al sicuro ?" Bene, questo è a te, Natura, che lo dico. So molto bene che non hai creato il mondo per il servizio degli uomini; Preferirei essere tentato di credere che l'hai organizzato apposta per tormentarli. Infine, ti chiedo : ti ho chiesto di portarmi in questo universo ? Tuttavia, se volontariamente, a mia insaputa, e non posso negare o opporvisi, che mi ci metto, non si ha il dovere, se non per assicurarsi che la gioia e la prosperità nel tuo regno, almeno per impedire che io sia una vittima e che stare mi ferisca. Quello che dico di me stesso, dico di tutta l'umanità, di tutti gli animali, di tutte le creature.

    NATURA : Ovviamente, non hai notato che la vita nell'universo è un sistema continuo di produzione e distruzione, e che questi momenti sono uniti insieme in modo che uno serve continuamente l'altro e per la salvaguardia del mondo. Se solo uno si ferma, il mondo si decompone immediatamente. È per questo motivo che l'esistenza di una singola creatura che non soffre, gli causerebbe un danno irreparabile.

    L'ISLANDESE : Tutti i filosofi dicono altretanto. Ma dal momento che tutto che è distrutto soffre e ciò che distrugge, non gode neanché e si vede ben presto distrutto a sua volta, dimi quello che nessun filosofo è mai stato in grado di dirmi; chi gode, chi beneficia di questo mondo di disgrazie, la cui vita è mantenuta solo al prezzo della sofferenza e della morte di tutto ciò che lo compone ?


    Mentre stavano discutendo questa domanda e alcuni altri della stessa natura, non è detto che c'è venuto due leoni così emaciati e così esausti dalla fame che avevano a malapena la forza di divorare l’islandese. Questo pasto permise loro di sopravvivere quel giorno. Ma altri negano la cosa e pretendono che una terribile raffica di vento ha gettato l'islandese a terra mentre parlava e lo costruì un superbo mausoleo di sabbia, sotto il quale, perfettamente essiccato e trasformato in una bella mummia, si è stato scoperto dai viaggiatori che lo hanno inviato al museo di una città sconosciuta in Europa.


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